L’AJCF fait peau neuve pour relever de nouveaux défis

1639134670630 Chine-info Zhu Shanshan

Créé en 2009, l’Association des Jeunes Chinois de France s’est imposée dans la sphère médiatique par son engagement politique et social depuis quelques années. Mais c’est avant tout sur le plan culturel que l’association souhaite apporter une contribution et faire évoluer les mentalités dans la société française. 

Partenaire de Chine-info pour l’organisation de la Chinese Food Week sur 5 éditions entre 2014 et 2018, nous sommes heureux d’avoir rencontré les membres du nouveau bureau administratif de 2021 – 2023, qui s’est donné les moyens de relever de nouveaux défis. 

Cette année, l’AJCF accueille un nouveau président, Thomas Cai et une nouvelle secrétaire générale, Céline Zheng. Par ailleurs, l’association se professionnalise avec la nomination de Flora Maïno en tant que Directrice générale. 

À l’horizon 2023, l’association a établi 5 pôles principaux au sein desquels des projets en cours et futurs entrent en résonance avec leurs aspirations :

Identité : procurer un espace d’échange et d’expression pour les jeunes d’origine chinoise vivant en France (conférences, débats, interventions scolaires et Projet Média)

Culture : promotion de la culture chinoise en France à travers les festivals de cinéma et les événements liés à la Chinese Food 

Histoire : faire découvrir et partager l’histoire de l’immigration chinoise en France (notamment par un travail de mémoire avec les anciens et les récits des travailleurs chinois de la 1ère Guerre Mondiale)

Lutte contre le racisme (médiatisation ; vidéo virale WeBelongHere ; ReactAsie ; Plateforme ASIES)

- Prévention & Éducation : actions de prévention dans les établissements scolaires et déconstruction de stéréotypes.

© AJCF

Chine-info : Quels sont les changements auxquels le nouveau bureau doit faire face aujourd’hui ? 

Thomas Cai : En interne, on a dû faire face à une restructuration de fait avec un nouveau bureau. Ensuite, nous avons classifié nos activités dans 5 thématiques, dans l’objectif de nous concentrer sur quelques sujets importants et de clarifier nos projets vis-à-vis du public.

Flora Maïno : L’autre défi important est de garder une stabilité dans le développement de nos projets, d’où la création du poste dans la direction générale que j’occupe en ce moment. Il nous a paru indispensable d’avoir une personne à temps plein chargée du bon déroulement de l’association. 

Chine-info : Vous avez participé aux commémorations des chinois de la 1ère Guerre Mondiale (qui a eu lieu le jeudi 11 novembre 2021 à Noyelles-sur-Mer). Quel regard portez-vous sur cette histoire ainsi que la façon dont elle est médiatisée en France ?

Thomas Cai : Je trouve ce sujet a été particulièrement peu médiatisé en France, mais cela peut s’expliquer par le fait qu’il s’agit de la journée du 11 novembre et que la plupart des médias sont concentrées sur les commémorations qui se sont tenues à Paris et autres lieux symboliques. 

Daniel Tran : Cette commémoration a été davantage médiatisée en 2018 avec le Centenaire de l’armistice de 1918. En plus l’année coïncidait avec les 103 ans de l’Amicale des Anciens Légionnaires d’origine chinoise en France (AALOCF), qui organise les commémorations à Noyelles-sur-Mer. D’ailleurs, l’AALOCF voudrait que nous allions allumer la flamme du Soldat inconnu sous l’Arc de Triomphe à une date ultérieure au 11 novembre pour gagner en visibilité. 

© AJCF

Chine-info : Au début de la pandémie, les asiatiques (et notamment les chinois) de France ont été victimes de racisme et ils ont été nombreux à communiquer sur ce problème et travailler sur la prévention. Est-ce que vous avez œuvré en collaboration avec d’autres associations dans la lutte contre le racisme ?  

Daniel Tran : C’est vrai que Laetitia [Laetitia Chhiv, ancienne présidente de l’AJCF] avait participé à plusieurs réunions, entre Elisabeth Moreno et le Préfet qui dirige la Dilcrah, auxquelles sont également présents les représentants des associations concernées mais on ne peut pas dire que nous avons travaillé ensemble. Sinon avec SOS Racisme, nous avions l’idée d’intervenir ensemble mais cela ne s’est pas encore concrétisé. 

Chine-info : Suite aux interventions médiatiques des asiatiques de France ces dernières années, pensez-vous que les français d’origine chinoise sont plus « visibles » dans les médias ? 

Thomas Cai : « Plus visibles », je ne sais pas, mais je dirai plus « considérés » dans le sens où le sujet du racisme anti-asiatique a vraiment émergé dans la société française et qu’on en parle dans les médias depuis les manifestations de 2016. Aujourd’hui on a désormais un mot pour qualifier cela [le racisme anti-asiatique], c’est déjà une avancée. Malheureusement, cette visibilité s’est faite suite à des événements tragiques qui ont eu lieu mais cela a fait émerger une prise de parole de la part des asiatiques et des chinois de France. Les gens osent davantage en parler, que ce soit à travers l’AJCF ou d’autres associations. Et la Covid-19 a évidemment exacerbé cette situation.

Flora Maïno : Avec la pandémie, on a effectivement vu les projecteurs sur nous [les asiatiques] mais c’était essentiellement sur des choses négatives. Alors c’est vrai que c’est un début mais on reste peu visibles dans les médias par ailleurs. Je pense que l’étape suivante serait d’œuvrer pour avoir une meilleure visibilité sur la scène publique en général. 

Chine-info : Avez-vous constaté une évolution dans la recherche d’identité des jeunes français d’origine chinoise ? Notez-vous des différences entres les secondes générations et les 3e générations par exemple ? 

Céline Zheng : Même au sein des deuxièmes générations, on n’a pas tous la même perception de notre identité. Par exemple, moi, personnellement, je me suis toujours sentie très chinoise. C’est certainement lié à ma passion [pour les séries hongkongaises et chinoises continentales] et à ma famille. Par exemple, j’ai grandi avec ma grand-mère qui ne parle que wen (dialecte du Wenzhou), qui célèbre scrupuleusement toutes les fêtes chinoises traditionnelles et qui cuisine chinois, forcément je me sens plus chinoise. Mais j’ai des ami(es) chinois qui parlent français avec leurs parents, donc ils se sentent plus français que chinois. 

Daniel Tran : C’est vrai qu’il y a une vraie diversité chez nos membres et à travers notre « Pôle mémoire » on a remarqué un regain d’intérêt sur cette question de recherche d’identité. L’histoire des travailleurs chinois de la Grande Guerre mise à part, les jeunes sont particulièrement intéressés par le travail que nous faisons sur les différentes vagues d’immigrations des Teochew, des cantonais du Vietnam ou des Wenzhou, qui sont arrivés en France dans les années 80-90, ça parle directement aux secondes générations de chinois car les récits racontent l’histoire de leurs parents. Ce travail de reconstitution historique et parfois de recherche généalogique aide beaucoup les membres qui se posent des questions sur leur identité. 

Flora Maïno : Effectivement, la plupart des membres qui viennent à l’association sont en quête d’identité, mais quand ils voient qu’il y a des personnes comme Grace [Ly*], par exemple, qui fait des projets autour de l’identité asiatique, cela leur donne de l’inspiration et peut susciter des initiatives. Il y a une sorte d’effervescence et d’émergence de projets d’expressions personnelles. Pour le moment cela peut être centré sur la quête d’identité mais ça peut évoluer. En cela, au sein de l’AJCF, nous avons une réelle volonté de transmettre et d’accompagner les jeunes en quête d’identité ou qui sont parfois en souffrance dans ce domaine. Plutôt que de leur dire ce qu’il faut faire, nous sommes davantage à l’écoute, nous les invitons à participer à nos activités pour finalement essayer de trouver par eux-mêmes des réponses à leurs questions. 

Thomas Cai : Je pense que c’est l’une des forces de l’AJCF dans la mesure où l’on est une lieu d’entraide où l’on est à l’écoute d’opinions différentes mais où l’on arrive à consolider des expériences communes.

Association des Jeunes Chinois de France

Nouveau bureau 2021 – 2023 :

Thomas CAI (蔡黎生), Président - Français d’origine chinoise (Wenzhou), à l’AJCF depuis 2020 © AJCF

Daniel TRAN (陈家辉), Vice-président - Français d'origine chinoise (Canton), de parents nés au Vietnam (Saigon), à l’AJCF depuis 2014 © AJCF

Céline ZHENG (郑茜茜), Secrétaire générale - Française d'origine chinoise (Wenzhou), à l’AJCF depuis 2020 © AJCF

Christophe LIU (刘多福), Trésorier - Français d’origine chinoise (Qingtian - Wenzhou), à l’AJCF depuis 2020 © AJCF

Flora MAÏNO (厉秀青), Directrice générale - Eurasienne d’une mère chinoise (Qingtian) et d’un père français, à l’AJCF depuis 2019 © AJCF

Historique de l’AJCF :

*Grace Ly : écrivaine (Jeune fille modèle, 2018), réalisatrice (Ça reste entre nous), podcasteuse (@Kifftarace) et blogueuse (La Petite banane) française née de parents chinois du Cambodge.

Photo © AJCF 

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